Ce jeudi 25 avril, le département (CD44) a validé la signature de dix-huit baux ruraux de neuf ans sur un premier lot important de terres de la zad. On peut se réjouir aujourd’hui que la majeure partie des projets agricoles issus de la lutte anti-aéroport puissent signer dès maintenant un bail et stabiliser ainsi l’expérience paysanne qui s’est construite grâce au mouvement d’occupation. Au cours de l’année, des baux devraient être obtenus sur plus de 300 ha, en plus des terres gardées par les paysans résistants historiques.
Pour tous les premiers projets signataires, des baux à clauses environnementales ont été signés. Avec l’attention que nous avons développée pour ce territoire et le soutien des Naturalistes en lutte, nos pratiques agricoles vont d’ores et déjà au-delà de ces clauses. Mais le département a aussi validé des baux à des agriculteurs qui avaient vendu leurs terres à Vinci et qui ont profité de l’abandon pour s’agrandir. À ceux-ci a été laissé le choix de signer de simples baux ruraux qui pourront permettre à certains d’entre eux de maintenir les pratiques les plus dévastatrices de l’agriculture conventionnelle, y compris sur des zones à très forts enjeux environnementaux. Le bail rural n’interdit pas par exemple d’amender les zones oligotrophes (particulièrement pauvres en éléments nutritifs), ce qui les ferait disparaître irréversiblement. Aucune mesure spécifique n’a été par ailleurs prise par le CD44 contre le drainage sur ce bocage, qui est pourtant essentiellement une zone humide avec des réserves en eau à protéger. De même pour l’arrachage des haies. Le CD44 promet que si un agriculteur déposait une demande d’arrachage ou de drainage, il ne lui accorderait pas les autorisations nécessaires. Cependant, nous avons infiniment plus confiance en ce qui se forge ici qu’en des promesses qui n’engagent que ceux qui y croient…
À l’issue de la signature de cette première série de baux sur les « terres historiques », le mouvement veut donc s’assurer que toute nouvelle attribution de terres ne puisse se faire sans les exigences d’un bail à clauses environnementales.
Mais au-delà de ces considérations techniques, c’est bien pour nos pratiques actuelles et futures et pour le rapport au vivant que nous tentons de tramer ici que nous nous battons. L’avenir de la zad que nous souhaitons construire nous paraît faire écho à la révolte de ces centaines de milliers de lycéens qui refusent de se faire former au travail comme si de rien n’était, alors que le monde s’écroule autour d’eux. En effet, pour imaginer des possibles dans cette situation d’effondrement, nous avons besoin de toutes les expériences concrètes menées sur des territoires où l’on bouleverse radicalement et collectivement nos relations au monde, et ce faisant à l’habitat et à la production. On ne sera jamais à la hauteur de la menace sans continuer à s’attaquer dans le même temps à tous les projets économiques climaticides autour de nous. Depuis l’expérience de la zad, nous appelons donc à rejoindre la grève mondiale pour le climat du 24 mai et à y former un cortège à Nantes.
Dans ce cadre, la bibliothèque du Taslu vous invite dès le 8 mai à une journée de réflexion sur l’écologie, dont voici l’appel et le programme :
« (…) Il s’agira à la fois de se rendre compte des implications concrètes, matérielles, que peuvent avoir les bouleversements climatiques sur les territoires que nous habitons et sur nos vies, et également de penser les luttes et conflits nécessaires pour prendre à bras-le-corps la question écologique.
Les soulèvements de la Terre peuvent être vus comme une révolte géologique et climatique contre ce que le capital impose au vivant. Les discours apocalyptiques ont de l’écho ; la catastrophe n’est plus à venir mais en cours, présente partout pour qui veut bien percevoir et écouter l’effondrement de la diversité des formes de vie.
Pourtant, devant l’ampleur du désastre amorcé, la résignation, le sentiment d’impuissance ou une indifférence passive semblent régner, même si çà et là, des gilets jaunes aux marches de jeunes pour le climat, des résistances contre les grands projets inutiles au désir de prendre soin de ce qui nous entoure, des gestes, des sursauts, des éclairs, dessinent les chemins d’une vie bonne.
L’écologie est une des clefs pour faire advenir la nécessité d’un changement profond de paradigme plutôt qu’une manière de s’en remettre toujours plus à l’État ou à la technologie pour retarder la catastrophe. Il y a urgence à ériger un futur désirable qui ne soit ni celui proposé par les transhumanistes, ni celui d’un monde toujours plus contrôlé et optimisé, ni enfin celui inégalitaire où une minorité de favorisés continue à vivre hors du terrestre aux dépens de tous.
Si la zad de Notre-Dame-des-Landes a suscité un grand enthousiasme, ce n’est pas seulement parce qu’elle a mené une lutte victorieuse contre les infrastructures du désastre et la dégradation du vivant. C’est également qu’elle exprime dans un même geste possibilité utopique et joyeuse d’un autre mode de vie, grâce à son rapport ancré au territoire et à sa façon d’y déployer des communs.
Pour prolonger cette double perspective, le Taslu vous invite à venir nombreux dès 10h, mercredi 8 mai à la zad. Cette journée s’inscrit dans le cadre du cycle Les soulèvements de la terre, qui se déroulera tout le long du mois de mai à Rennes.
Journée de réflexion sur l’ÉCOLOGIE à la zad de Notre-Dame-des-Landes
Mercredi 8 mai, à partir de 10h, à la bergerie des 100 Noms, hameau du Liminbout, Notre-Dame-des-Landes
10h : Réflexions autour de la forêt
– Quelques considérations sur le réchauffement climatique en cours et ses répercussions sur les écosystèmes forestiers.
– Sortir de l’exploitation du vivant et arpenter d’autres imaginaires que la sacralisation : la forêt en exemple.
Avec Michel et Clément, membres d’Abrakadabois (groupe de bûcherons, charpentiers, élagueurs, ingénieurs forestiers, sur la zad).
12h : L’avis du sol : un atout contre le réchauffement et les aléas climatiques.
Avec Xavier, habitant de la zad, ancien agriculteur.
Repas : Amenez votre pique-nique !
14h : Balade botanique anticipatrice post-apocalyptique : à quoi ressemblerait la zad à 4 degrés de plus ?
Avec Jean-Marie, naturaliste en lutte.
16h30 : La recomposition des mondes (Seuil, 2019) avec Alessandro Pignocchi, auteur de BD. Présentation de sa nouvelle BD avec tout particulièrement un accent mis sur sa vision de la zad comme un territoire où vise à être dépassée la séparation entre nature et culture.
16h30 : Sauvons les terres et le climat !
– Quels impacts du réchauffement climatique sur nos pratiques agricoles ?
– Lutte foncière à la zad et ailleurs : arracher des terres agricoles communes pour les préserver durablement et y faire vivre un autre type d’agriculture.
Avec Cécile, éleveuse de brebis sur la zad et technicienne à Patur’ajuste, réseau pour la valorisation des végétations naturelles par l’élevage, et Thomas Rabu, éleveur de brebis, paysan boulanger à Varades (44), et membre du réseau Paysans de nature.
18h30 : Que faire ? Face à l’ampleur du désastre écologique, comment et où trouver la force d’agir et ne pas se laisser submerger par un sentiment d’impuissance ?
– Histoire des camps climat des années 2000 par Isabelle Frémaux et John Jordan.
– Marche pour le climat : quelles ambitions ? Quelles perspectives ? Comment et depuis où s’y impliquer ?
21h : Repas
22h : Rite autour de la forêt de Rohanne suivi d’une boum apocalyptique