Vœux exaucés
Le 31 décembre dernier, Mme d’Hauteserre, maire du 8ème arrondissement de Paris, déclarait sur LCI : « Nous appelons au sens de la responsabilité de tous ceux qui veulent venir casser. Au moins qu’il y ait une trêve. Cela s’appelle la trêve des confiseurs. Ils peuvent revenir ensuite, comme ils veulent… »
Il semblerait bien que d’aucuns aient entendu le souhait de l’édile : après une Saint-Sylvestre fort calme sur les Champs-Élysées, l’acte VIII a vu un transpalette fêter le retour de la liesse en gilet jaune en s’invitant au Ministère des Relations avec le Parlement malgré la porte close, avant de finir encastré dans une banque.
Si Vinci recule, comment veux-tu ?
Par ici, on croyait être les champions en terme de reculade du géant du BTP, mais dernièrement, nous avons été pris de vitesse. En quelques jours, l’entreprise a en effet annulé son projet de faire payer les automobilistes ayant bénéficié des péages gratuits des gilets jaunes. Les incendies de ses infrastructures après cette annonce ont-il pesé sur cette décision ? Quoi qu’il en soit, après un tel désaveu, il ne reste plus pour « les dirigeants du groupe », qu’à « aller sur les ronds-points », comme les y avait invités Benjamin Griveaux, avant d’être lui-même rattrapé par ces réalités du terrain qu’il prétendait rappeler à Vinci. Encore mieux que Vinci : ce sont les ronds-points qui sont venus à lui.
Feu Amazon-des-Landes
Bref coup de fil matinal sur le téléphone presse de la zad : « Bonjour monsieur, je suis responsable de communication chez Amazon. Nous cherchons à entrer en contact avec la zad pour vous assurer que nous n’allons pas installer d’entrepôt logistique à Grandchamps-des-Fontaines. Nous vous serions donc fort reconnaissants de mettre fin à votre campagne de communication à ce sujet. » « Très bien ! Et qu’on ne vous revoie pas dans le coin. »
Après le départ de Vinci, les vœux d’installation d’un second poids lourd de l’économie mondiale juste à côté de Notre-Dame-des-Landes viennent à leur tour de capoter. Quelques articles de presse sur la « nouvelle bataille des zadistes » et l’annonce d’une première réunion publique à ce sujet en décembre auront vraisemblablement suffi à rappeler aux cadors du commerce en ligne qu’ils pouvaient difficilement trouver une pire localisation en vue de parachuter une base de 10 ha pour redistribuer leurs petits colis. Pour Amazon, ce genre d’idées brillantes restera pour l’instant l’objet d’une grande œuvre de fiction avec… « Deutsch-les-Landes », la première série française de sa plateforme Prime Video. Celle-ci raconte l’envahissement brutal d’un village français par une super entreprise allemande qui débarque un beau matin en convoi de Mercedes… En attendant, dans la réalité, et puisqu’on ne veut d’Amazon ni ici ni ailleurs, il est encore possible de rejoindre les actions de blocage des gilets jaunes qui sont parvenus à paralyser à plusieurs reprises les plate-formes logistiques de l’entreprise à divers endroits du pays au cours des dernières semaines. Il reste aussi à veiller à ce qu’Amazon ne nous fasse pas le coup de Deutsch-les-Landes en allant se poser juste un peu plus loin dans la région !
Une vache maraîchine offerte à la zad
Ludivine Cosson et Frédéric Signoret, deux éleveurs du marais breton, ont offert à la zad Ononis, jeune vache maraîchine. Voici la lettre qu’ils ont ensuite envoyée :
Nous avons passé quelques semaines à la ferme de Bellevue en 2014. À l’issue de ce séjour en roulotte, nous avions promis de donner une maraîchine aux apprentis éleveurs qui fabriquaient de délicieux beurres et fromages dans des conditions particulièrement précaires. La génisse Ononis est arrivée samedi 6 janvier 2019 après un voyage de deux heures depuis le marais breton. Ce parrainage est l’occasion d’enfoncer le clou pour le réseau « Paysan de Nature » sur le thème de la biodiversité domestique et sauvage. La vache maraîchine est une des races locales régionales, cousine très proche de la Nantaise, elle a évolué dans les prairies naturelles du Poitou. Les maraîchines, comme les nantaises et les petites bretonnes, sont des animaux bien adaptés à la préservation du paysage authentique épargné de justesse et de haute lutte à Notre-Dame-des-Landes. Les éleveurs de la zad relèvent de nombreux défis pour le patrimoine commun. Dorénavant, ils sont impliqués dans la transmission de ce patrimoine génétique ancien qui a coévolué grâce à la diversité des paysages et des savoir-faire paysans.
Ne pas labourer les prairies, ne pas y apporter d’engrais, nourrir les vaches avec la végétation spontanée, notamment les arbustes des haies dans des périodes choisies pour ne pas les pénaliser, ne pas traiter les animaux systématiquement avec la chimie : ce sont les conditions qui ont permis la coévolution des biodiversités domestiques et sauvages.
C’est parce que la zad est un symbole important pour l’émergence d’une agriculture réconciliée avec la vie sauvage que nous avons fait ce cadeau à tous les porteurs d’espoir qui réinventent l’agriculture dans ce bocage exceptionnel.
Ludivine Cosson et Frédéric Signoret